La Liberté au risque de la santé publique » de Nicolas Tanti-Hardouin Les Belles Lettres (2013)
Dans la droite ligne des analyses biopolitiques de Roland Gori, Didier Fassin et Raymond Massé, Nicolas Tanti-Hardouin développe dans cet ouvrage une analyse critique des politiques et discours sur la santé publique contemporaine. Il montre comment le pouvoir médical s’arrime aujourd’hui profondément dans les discours et dans les politiques de prévention.
Reprenant les analyses de Roland Gori sur l’évolution de la psychiatrie, Nicolas Tanti-Hardouin analyse par exemple le déclin de la notion de maladie mentale au profit de notion de trouble. Il montre comment ce passage participe d’une entreprise de normalisation des conduites.
En s’appuyant précisément sur les analyses de Raymond Massé, à qui il emprunte le titre de son chapitre II « la santé publique comme nouvelle moralité », Nicolas Tanti-Hardouin identifie dans les discours de santé publique contemporains une logique concourant à culpabiliser les malades et à reporter sur eux une charge financière de leur maladie. Le droit aux soins se transformerait progressivement en un devoir de se maintenir en bonne santé.
Dans le contexte politique d’un vaste mouvement libéral tendu vers une « individualisation des valeurs », la santé devient un capital à la responsabilité du sujet, qui doit s’efforcer de s’auto approprier les normes prescrites de la santé publique.
L’ouvrage se termine sur la question des disparités sociales des comportements sanitaires. Il détaille certaines cibles des politiques de santé publique actuelle (addiction, nutrition, sécurité routière) et souligne les profondes fractures sociales.
Avec cet ouvrage, Nicolas Tanti-Hardouin développe une synthèse accessible et pertinente des enjeux éthiques actuels posés aujourd’hui par la mise en œuvre des politiques de santé publique des pays occidentaux.
Aurélien Dutier
Chargé de mission, EREPL