L’accompagnement des parcours de santé et de vie des personnes souffrant de troubles psychiques chroniques fait participer une grande pluralité d’acteurs, dont la complémentarité d’approches et de compétences nécessite des ajustements singuliers, et concertés. Cet accompagnement, diversifié, personnalisé, assuré la plupart du temps sur de longs mois, ou années, génère une multitude de données informatives, portant sur des registres différents (diagnostiques, thérapeutiques, cliniques, fonctionnels, subjectifs, concrets et factuels, portant sur la vie quotidienne, la dimension de la citoyenneté, la vie au travail, la vie dans un logement, le parcours de rétablissement, la poursuite et l’avancée du projet de vie etc.) Bien souvent, la vie des personnes souffrant de ces troubles devient ainsi une sorte d’espace transparent, conquis, où les professionnels, animés des meilleures intentions, et pour agir utilement, s’approprient ces données, sont amenés à les partager, à les traiter, empiétant inévitablement sur le champ du libre-arbitre et de la vie privée. Comment, dès lors, assurer une continuité du soin et de l’accompagnement tout en préservant la confidentialité des personnes accompagnées ? Comment décloisonner les pratiques, intégrer au maximum les familles et les aidants, favoriser le travail en équipe tout en protégeant les secrets des personnes accompagnées ? Jusqu’où les informations recueillies et transmises peuvent basculer vers le jugement de valeur ou induire des logiques de stigmatisation qui enferment la personne accompagnée dans des stéréotypes ? Au-delà des bonnes intentions des différents acteurs, comment anticiper et appréhender les menaces générées par l’utilisation des dispositifs techniques ? Techniquement, il est sans doute, et d’abord, possible de limiter le champ des informations partagées à ce qui est indispensable à chacun pour l’exercice de sa fonction propre auprès du bénéficiaire. Encore faudrait-il, maintenant, commencer ce travail contractuel d’explicitation. Mais cette première étape ne nous exonérera pas du travail de réflexion éthique : les principes peuvent être clairs, leur application ne pourra jamais l’être. Les réalités concrètes, le contexte relationnel, les singularités de la pathologie ou du caractère de la personne, la complexité objective de la situation ne pourront jamais autoriser une mise en œuvre mécanique des recommandations élaborées. Comment, dès lors garder le cap du respect du droit de la personne à rester maître de ce que l’on sait d’elle ? L’Espace Éthique Régional et le Centre Ressource Handicap Psychique des Pays de la Loire vous convient à explorer avec eux cette thématique, et, s’il est possible, à faire progresser les pratiques.