Le 21 février 2018 s’est tenu à la Manufacture des Tabac à Nantes, dans le cadre des états généraux de la Bioéthique, le 5ème débat citoyen de l’EREPL : « L’Assistance Médicale à la Procréation (A.M.P.) pour tou·te·s?
Pour tenir compte de la capacité d’accueil de la salle municipale de la Manufacture et respecter les consignes de sécurité, une inscription par mail avait été prévue. En quelques jours, les 200 places disponibles furent réservées.
Le débat commence par les interventions de Paul Barrière, (Professeur des Universités, Praticien Hospitalier – Chef du pôle hospitalo-universitaire (PHU) 5 « femme-enfant-adolescent » – Responsable du centre AMP du CHU de Nantes), Magalie Bouteille (Maitre de conférences en droit privé – Le Mans-Université) et Aurélien Dutier, (Philosophe, Chargé de mission de l’Espace de Réflexion Ethique des Pays de la Loire) qui posent le cadre médical, les repères juridiques et les grandes pistes de réflexion éthiques du débat.
Trois grandes thématiques sont proposées pour structurer le cadre des échanges :
- De nouveaux critères d’accès à l’A.M.P. ? (Discussion autour de la loi actuelle : Article L2141-2 : « Couple formé d’un homme et d’une femme, vivants, en âge de procréer»
- De nouveaux droits ? (Droit à l’enfant vs Droit de l’enfant ? Droit à connaitre ses origines ? Levée de l’anonymat du don de gamètes ? )
- De nouvelles approches ? (De nouvelles normes familiales ? Une nouvelle place pour la technique ? Quelle place pour l’autoconservation « sociétale » des ovocytes ? Faut-il interroger la gratuité du don de gamètes ? Repenser le remboursement de l’A.M.P. ? Quels enjeux autour de la GPA ? )
Antony Torzec, journaliste, anime le débat en s’appuyant sur cette trame. Avec le Dr Miguel Jean, il rappelle l’importance de l’écoute et du respect de chacun pour garantir un débat démocratique et serein. « Ni spectacle, ni tribune ! »
Dès les premières prises de paroles dans la salle, les tensions sont palpables et les échanges parfois musclés. Du côté des personnes opposées à l’ouverture de l’AMP, les menaces contre « l’intérêt de l’enfant » sont rapidement mises en avant. « L’enfant a le droit d’avoir un père et une mère ». Un intervenant parle de la « déliquescence des familles sans autorité paternelle ». Un autre « ne souhaite pas que demain la France soit gouvernée par des psychologues qui prennent en charge nos enfants ». La médecine n’aurait pas, pour ce participant, « vocation à soulager un désir d’enfant » et un autre est « vivement attristé et opposé à toute forme d’AMP » car « il s’agit non pas de médecins qui soignent mais d’experts qui manipulent. »
Du côté des personnes favorables à l’ouverture de l’AMP, l’égalité des droits et le refus des discriminations sont mis en avant. Une participante, « ne veux pas que les familles monoparentales soient considérées comme un délitement de la société. Je pense qu’aujourd’hui il est temps que les femmes seules et les couples homosexuels accèdent à l’égalité des droits d’accéder à la parentalité en France ». Pour une autre intervenante, « l’homosexualité n’est ni illégale ni pathologique alors nos enfants et nos familles n’ont pas à faire l’objet d’une observation particulière».
Les prises de paroles et les réactions parfois tendues des participants témoignent de positions souvent irréconciliables. Pour autant, cette réunion aura contribué à ouvrir un espace d’échanges qui trouve sa place dans les Etats généraux de la bioéthique 2018.